photo: S. Ouradou

dimanche 5 décembre 2010

Rencontre avec Lamine Camara - Sémard

Voici l'interview complète de ma rencontre avec Lamine Camara, habitant du quartier Sémard et qui travaille avec les jeunes dans le domaine du sport. C'est l'occasion d'aborder la vie du quartier, les politiques départementales pour la jeunesse ou le droit à la mobilité et aux transports. Cela m'a permis aussi de faire le point sur certaines de mes actions en tant que conseillère générale. Bonne lecture.
Lamine : Cela fait cinq ans que j’habite ici. Je ne suis pas trop là en journée, j’ai de bonnes relations de voisinage, et je trouve ce quartier très calme. Je n’ai pas d’enfants donc je ne sais pas s’il ya tout ce qu’il faut pour eux, mais l’école est en face, et puis il y a le stade Delaune juste en face. La PMI a l ‘air très active, et ça compte pour moi, qui suis investi dans la prévention de la santé.

J’ai vraiment beaucoup apprécié la rénovation de la cité. J’habitais Allende, et des travaux, j’en ai vu, mais là, c’est vraiment bien, les doubles vitrages, le parquet, les robinets…le problème ici, c’est surtout le bruit du train, mais avec le double vitrage, ça va beaucoup mieux. Et il paraît qu’il va y avoir un mur anti bruit, il va être comment, ça va être haut?

Florence : le mur anti bruit est une lutte dans laquelle je me suis engagée avec les habitants il y a des années. Les travaux vont enfin commencer, il s’agit d’un mur de cinq mètres de hauteur, qui va permettre de pouvoir être au pied de la cité sans être gêné par le bruit du train. Je ne sais pas comment il va être, car nous avons gagné ce mur, mais les habitants n’ont pas pu intervenir sur son aspect. Cela je le regrette, et du coup, dans le quartier Paul Eluard, où nous avons obtenu une étude pour une protection phonique, je compte bien imposer une consultation des habitants

Lamine : C’est vrai que j’ai l’avantage d’avoir une voiture, et d’aimer me déplacer à pied, parce que pour les transports en commun, c’est vrai qu’ici c’est comme à Romain Rolland, l’accès est difficile .Du coup, il y a parfois un problème de circulation de voitures, à 18 heures on se bloque tous un peu, mais je préfère qu’on gère cela entre habitants, plutôt que d’imposer un sens interdit.

Florence : il va y avoir un arrêt du tramway qui va vers Sarcelles, et surtout le Tram Y, financé par le Conseil général, qui va passer au carrefour Poterie, ce qui offrira plus de choix. A ce propos, une de mes batailles actuelles concerne l’information des habitants sur les travaux. La rue du 19 mars 1961 risque d’être en sens unique un moment, et j’interviens auprès de la RATP et du Conseil général pour vérifier que ce ne sera pas un enfer pour les gens du quartier.

Lamine : C’est sur qu’il faut que les travaux se fassent, mais c’est important aussi de pouvoir venir sans trop de difficultés au stade. Je suis sportif, et ce qui m’intéresse c’est le sport préventif, utile aux personnes diabétiques, en surpoids, etc…Cette préoccupation m’est venue en faisant du basket car j’ai remarqué que beaucoup de joueurs se blessent, que certains, notamment chez les filles, ont un problème de surpoids, et j’avais même un joueur épileptique avec lequel j’ai beaucoup appris. J’ai eu une formation d’éducateur sportif, une licence de Staps. J’ai rencontré le docteur Avronsart, et j’ai donc monté un projet qui allie éducation thérapeutique et sport, qui concerne autant les anciens que des ados. J’aimerais mettre en place un système d’emprunt de matériel sportif à moindre coût. La Maison de la santé, Le réseau diabète Dianefra 93, la ville de Saint Denis soutiennent le projet, mais ce qui manque, c’est l’information auprès des usagers.

Florence : Oui, il est nécessaire de nouer des réseaux pour faciliter la rencontre et l’information. A la PMI par exemple, les parents peuvent être intéressés pour eux même, et dans les collèges, les professeurs de sport pourraient être relais, les infirmières aussi, mais encore faut-il qu’il y en ait.

Lamine : Bouger, cela s’apprend, se découvre. Sinon chacun reste chez soi, sans activité physique. Et culturelle non plus d’ailleurs. Et déjà, la fin du remboursement de la carte Imagin’R est problématique. Je m’occupe de prévention sportive, mais je me dis qu’il faudrait de la « prévention culturelle » aussi. La musique se télécharge, mais aller voir un spectacle est hors de prix. C’est important de donner l’envie d’aller voir de la musique avec de vrais instruments, de découvrir qu’on peut varier les spectacles par des initiations au théâtre. Ce serait bien qu’il y ait une aide par exemple pour payer les places. Il me semble que dans certains départements il y a des aides à l’achat de livres ou de disques.

Florence : La fin du remboursement de la carte Imagin’R et l’augmentation du prix de la carte Améthyste concourent à enfermer les anciens et les jeunes entre leurs murs. Je me bats aussi pour un Pass Culture qui permette un accès à tarif réduit aux spectacles, et surtout pour que se soit sur le terrain que se décident les actions. Les équipes des collèges par exemple doivent être écoutées pour monter des projets autour du théâtre ou de la musique. Ainsi Zebrock développait depuis longtemps des rencontres sur les différents style de musique, tout au long de l’année, qui débouchaient sur une participation à des concerts. De ce point de vue, le système mis en place par le Conseil général ne convient pas : des appels à projet sélectionnent des associations sur des projets « clés en main », et ensuite elles démarchent des collèges qui doivent se couler dans un cadre défini sans eux.

Lamine : Autre question sur la culture : nous sommes sur un territoire où se développe des entreprises de l’audio visuel, comment permettre aux jeunes habitants de s’orienter vers ces métiers ? Ca ne concerne pas que le Conseil général, mais j’ai l’impression quand même que côté stage de troisième au collège, il n’y a toujours pas grand chose de mis en place.

Florence : j’ai plusieurs fois proposé aux Conseils d’administration des collèges de faire une convention avec Plaine Commune promotion, un regroupement d’entrepreneurs du territoire, mais c’est un travail qui reste vraiment à faire.

Lamine : surtout qu’ici, la plus part des jeunes n’ont comme visibilité d’emploi qu’une « entreprise » : la mairie. La seule place envisagée pour beaucoup de ceux que je connais c’est là. Il est important de créer des passerelles vers les entreprises. Et plutôt des entreprises à échelle humaine, pas forcement des gros groupes où il faut bac plus cinq et un costume-cravate. C’est pour ça que se tourner vers l’audiovisuel serait positif.

Florence : Que ce soit pour ce que tu dis sur la culture, l’emploi ou ton projet de prévention, on voit bien le besoin de se fédérer, que chacun puisse compter si on veut aboutir. C’est aussi ce que j’essaie de faire sur le quartier. A ma place de conseillère générale, j’ai pu par exemple mettre en place un conseil de crèche avec des représentants parents à la crèche départementale Sémard, pour discuter de toutes les questions que souhaitent poser les parents, du manque de personnel aussi. J’insiste sur la place des parents, mais pour qu’ils puissnet vraiment participer, que leur avis soit pris en considération.

Lamine : C’est pas comme dans une crèche parentale.

Florence : Le conseil de crèche est important pour ça ,mais pas suffisant, ça reste encore trop institutionnel, c’est le conseil général qui fait l’ordre du jour, les parents doivent être plus partie prenante.

Lamine : Ma femme est éducatrice de jeunes enfants, elle voit les différences, et il y a aussi des crèches d’entreprise, des crèches privées

Florence : Les crèches privés font de l’argent sur ce besoin de garde d’enfants. La crèche de Sémard est départementale, elle accueille des enfants bien au delà du quartier, elle n’est pas suffisante pour répondre aux besoins. Ce besoin de mode de garde a donné lieu à un projet d’habitants ici, pour garder les enfants scolarisés le tôt le matin: c’est « Comme un poisson dans l’eau », qui a aussi créé deux emploi pour des habitantes du quartier.
Je suis allée avec eux demander une aide exceptionnelle du Conseil général lorsqu’ils étaient en difficulté.
Du mur anti bruit à la crèche ,de la PMI à « Comme un poisson dans l’eau », on voit bien que quand j’accompagne les idées et les énergies des habitants nous gagnons.

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